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Autres poèmes
Papillon mort...
Papillon mort en plein soleil:
Tes ailes battent dans le vent
Comme si tu étais vivant; -
Ah! vers quel songe sans pareil
Te mène ton dernier sommeil,
Ou vers quel pur Soleil levant?
Tu vis au fond de moi...
Tu vis au fond de moi comme personne au monde:
Comme le gouffre au fond de l'eau la plus profonde,
Tellement il n'est rien dans mon fragile espace
Qui ne vienne de toi sans y laisser de trace
Et n'y fasse surgir le signe sans pareil
De ce qui meurt de vivre au coeur du s(S)oleil!
La pente du feuillage...
La pente du feuillage est celle de la terre
Qui l'attire vers elle en son pouvoir puissant.
O bel arbre toujours vers l'astre renaissant,
Tu penches vers le sol où l'ombre tutélaire
T'irrigue pour jamais de cette force altière
Qui te fait rejaillir sans cesse en la lumière, -
Comme l'âme s'épuise à boire l'or du sang!
Quand se brise le vase...
Quand se brise le vase où le parfum respire,
Le parfum se répand par tout le vaste empire
Et rien ne reste plus de fort et de caché,-
Comme une source incluse au centre du rocher!
Ciel sans nuage...
Ciel sans nuage, ô ma p(P)atrie,
Qu'as-tu fait de ce qui voyage?-
Vers l'incessant fuyant nuage
Mon âme impatiente crie!...
Toute la mer...
Toute la mer tremble de voir
Les feux du ciel, le calme soir,
Le tourment d'âme dans le noir,
Et la Mort même et son pouvoir,
Tomber dans l'or de ton miroir!
Je cherche...
Je cherche la fraîcheur des arbres dans le vent;
La lumière qu'un peu de tendre feuille avive;
Le lointain tamisé d'un songe captivant; -
Et cette eau, dans le coeur, qui, jusqu'à l'âme, arrive!...
Je m'en vais...
Je m'en vais vers la nuit végétale et profonde
Où le soleil des jours emplit le coeur du monde
D'une telle ferveur nocturene et sans appel
Qu'elle a pour l'âme seule seule un goût de l'éternel!
Tu respires l'hiver...
Tu respires l'hiver qui s'avance vers toi,
Triste fleur automnale en l'or qui transfigure
Tout ce qui va mourir de gloire et l'aventure
D'une douceur si tendre en le soleil qui dure,
Qu'elle tremble déjà du grand désert du froid!
A s'enfermer...
A s'enfermer sur son silence,
Le silence fait un tel bruit
Que la vie en la mort balance,
Comme si, de la moindre chance,
La seule mort était le fruit!
La mer est verte...
La mer est verte sous les pins
Qui bordent le rivage; -
En quelles faims,
Avec mon coeur sans âge?...
Pourquoi dans le désert...
Pourquoi dans le désert mon âme tout entière
Promise au feu pourtant total de la lumière; -
Et tout ce clair du ciel en l'air qui m'environne,
Lorsqu'en l'âme le vent de tant d'orages tonne!
L'éternité...
L'éternité qui me dévore
Me vient des arbres que je vois,
Tristes et purs en leurs pavois,
D'un vert de nuit que l'astre dore
De rayons fulgurants et droits!
Parfait Soleil...
Parfait Soleil, en l'altitude qui perdure,
Tu dévores l'Automne et tes rayons brûlants
Prolongent du ciel clair des heures l'envergure
Jusqu'au coeur même en nous des astres violents!
Nous allons vers la mer...
Nous allons vers la mer de l'éternel retour; -
Rien ne demeure plus que la Mémoire ardente
De ce qui fut la Mer immense, mon Amante, -
Avec les oiseaux fous d'un rêve sans détour!
D'une Beauté tremblante...
D'une Beauté tremblante au bord d'une eau de Loire,
Saluant du Soleil des astres la Victoire,
Sur ta roche d'un jour de gloire tu ne fus,
Vierge, que ce Refuge où le désir vient boire,
Quand ne monte vers Toi de l'âme nul refus!...
(Béhuard)
Peupliers vifs...
Peupliers vifs au vent du soir
Vous frissonnez sans le savoir
Comme des astres dans le noir!
Comme un feu...
Meuglement de la bête au fond de l'été triste,
L'odeur de l'herbe ardente et folle se répand
Comme un feu qui suivrait la désertique piste
Tout alentour de l'air où le soleil persiste, -
Et l'âme de survivre à l'ombre se surprend!
J'interroge le temps...
J'interroge le temps qui s'ouvre devant moi
Et ne puis m'empêcher, dans mon désir de vivre,
De lui redemander sans cesse qu'il me livre
Le comment de mon existence et le pourquoi!
De la cime...
De la cime jusqu'au feuillage
L'ombre s'étend jusques au coeur
De cet ultime paysage
Qui détruit tout sur son passage
De ce qui reste de malheur
En ce particulier rivage
Pour mieux en devenir vainqueur!
O coeur brisé...
O coeur brisé par la douleur qui monte
Du fond de toi comme d'un gouffre amer,
Comme une force de pure neige haute dans la mer!...
Quelques feuilles...
Quelques feuilles sur l'escalier
Témoignent que l'hiver arrive
Et que sur la terrestre rive
Soleil et mort vont se lier!
Marguerites...
Marguerites dans le vent folles
Se balancent comme paroles
Au gré mouvant de leurs corolles!...
Et l'eau...
Et l'eau de la rivière
Et l'âme de ce lieu
S'en vont vers la lumière
Immobile de Dieu!
A la limite extrême...
A la limite extrême en l'être de l'Epure,
Le cri de la mouette intense transfigure
L'universel silence inscrit dans la blessure
Du seul mortel secret qui dans ton coeur perdure, -
En un parfait instant de conscience pure!
La mer dévore...
La mer dévore le rivage,
Et toi, mon seul amour, sais-tu
Ce qu'il advient du paysage
Où ton silence s'est tû?
Ta main...
Ta main de naufragée
En la mienne s'égare, -
Comme l'or d'un navire
En la douceur d'un phare!
Comme il allait...
Comme il allait vers l'ombre
Où s'engouffrait la nuit,
Il vit, dans la pénombre,
L'âme du temps qui fuit!
Je ne respire plus...
Je ne respire plus que l'or d'un songe épars
A travers la lumière errante en tes regards!
Mon Amour adoré dans l'ombre du soir clair!...
Et je vis, ramassé dans l'ombre qu'il éclaire,
Le feu de mon cerveau rouler comme un tonnerre!...
Aucun nuage...
Aucun nuage: tout est nu.
Rien ne respire que le vent.
Quel est, du fond de l'inconnu,
Cet astre fol, à coeur perdu,
Qui va, dans l'âme se levant?
Le grand vent...
Le grand vent qui balaie en moi toute la vie
Respire de survivre au feu de mon désir, -
Quand la clarté des jours est par la mort suivie
De ce qui retenait notre âme d'en mourir!
Pierre lucide...
Pierre lucide et d'angle au front
D'un ciel vivace qui s'efface
Sous les nuages qu'un vent menace!
Passe, Soleil...
Passe, Soleil, en moi, de grâce,
Lorsque l'orage nous menace,
Que vibre un ciel que rien n'efface
Et que nul songe ne corrompt!
L'horizon s'agrandit...
L'horizon s'agrandit devant tes yeux d'airain;
Le soleil vers ton ombre en vain se précipite;
Tout ce qui vit encore au fond de l'air t'invite
A te perdre en l'espace même qui t'étreint:
Il n'est plus dans ton coeur de songe souverain
Que la vague n'emporte, en sa tristesse, - vite!...
Je n'étais rien...
Je n'étais rien qu'un souffle fou sur la mer folle,
Et le vent qui passait comme une parabole
Emporta jusqu'au fond des songes ma parole!...
Le lac
L'horizon déchiré d'éclatante lumière
Plonge dans l'or des jours la solitude entière!
Lac prisonnier des berges de la nuit;
Lac dont le flot dans mon silence bruit!
Pierre dans l'eau, qui la recouvre;
Ainsi l'abîme, en l'âme, s'ouvre!...
Le lac, le vent: l'eau qui frémit:
Et mon propre désert, parmi!
Châtaigne vive, en sa rousseur; -
Ne l'es-tu pas aussi, mon coeur?
Mortellement blessé par l'éternité pure
D'un soleil qui déserte en l'âme la blessure
Et l'entraîne à se perdre au plus secret désert
Qui se puisse former par elle dans la chair!
Tumultueuses eaux...
Tumultueuses eaux qui rongent le rivage;
Comme dans ma mémoire folle, les autans!
La barque ne peut pas perdre à son tour courage
Sans faire disparaître en elle le printemps!
Soleil glacé...
Soleil glacé comme une eau froide,
Tu prends ma gorge dans tes rêts -
A rendre l'âme toute roide
D'être attentive à tes attraits!
Cher Arbre...
Cher Arbre qui me vois et dont l'architecture
Ressemble, à s'y méprendre
A celle de mon âme au fond de ma figure,
Que sais-tu donc de moi, toi dont les bras profonds
Font briller du soleil la conscience pure?
Beauté!
La beauté même te dévaste :
Tout n'est qu'un masque plus ou moins; -
Et la détresse la plus vaste,
Te couvre l'âme de ses soins!
Sombres arbres...
Sombres arbres, vêtus d'innocente parure
Mais profonde à mourir au coeur d'un rêve fou,
Que me redites-vous qui ne soit d'ombre pure,
Quand le vent seulement incessamment murmure
Qu'il n'y a d'autre ivresse en l'âme qui perdure
Que celle qui nous vient d'un Dieu qui contient tout!
L'herbe...
L'herbe s'accroît de l'air qui vibre
Autour de toi comme un désert; -
Et de mon âme aussi la fibre
Au coeur de sa mortelle chair!
Immortel silence...
Immortel silence au coeur du printemps;
Le coeur se balance au coeur des autans;
Et rien ne persiste en l'univers clos
Que d'un ciel la piste au coeur des sanglots!
Les jours sans fin...
Les jours sans fin qui s'amenuisent;
Les amitiés qui se défont:
L'éternité n'a plus de prise
Sur les gouffres d'Amour sans fond!
Creuse...
Creuse en sa profondeur
Ce que la source vive
T'apporte jusqu'au coeur
Du feu qui la captive!...
Criant Visage...
Criant Visage où la Vérité tremble
D'être la Force et la Tendresse ensemble,
Pénètre-moi de ce Désir de Feu
Qui nous fera renaître infiniment en Dieu!
O mer, indifférente...
O mer, indifférente au bruit que font les vagues,
A tes lames de fond qui nous blessent le coeur,
Et de l'éternité la troublante rumeur; -
En l'âpre certitude et folle de ces dagues
Dont brille, dans l'éclair de l'âme, la lueur!
Toujours la feuille...
Toujours la feuille qui frissonne
Dans le vent pur qui s'abandonne
Au jour que le soleil te donne!
Papillon fou...
Papillon fou de vague errance,
Comme les fleurs de Saadi,
L'illusion qui te perdit,
Est celle-même, en plein midi,
Qui mit mon âme folle en transe!
Où je marche...
Où je marche, va ma personne,
De la manière que je suis;
Et mon pas seulement résonne
Comme au fond d'un unique puits!
Je déambule...
Je déambule sur la terre
Des Rinfillières au grand jour; -
Et le soleil que rien n'altère
De ma lumière a fait le tour!
On a roulé...
On a roulé la moisson blonde
Dessus les prés couleur de feu, -
Et la glèbe au soleil féconde
Ce même pain de par le monde
Qui peut aussi devenir Dieu!
Fougère et chardon bleu se mêlent
Dans un frisson de clarté frêle!...
Les arbres dépouillés...
Les arbres dépouillés sont comme des squelettes
En attente au printemps de toutes les tempêtes
De lumière féconde et de jaillissement
De sève intérieure inexorablement!
La nuit...
La nuit trempe ses yeux
Dans l'océan des larmes
De ce coeur qu'entreprend
Le rire des alarmes!
Comme le cerf...
Comme le cerf qui s'en vient boire
L'eau de la source au coeur du pré,
L'âme se plonge en la mémoire
De son inaltérable histoire, -
Jusques aux rives du sacré!
Le pré...
Le pré respire devant moi, d'un calme vert,
Et le vent qui m'apporte un songe, à découvert,
Me berce de la voix lointaine de la mer!
Comme l'ombre...
Comme l'ombre s'inscrit au coeur du calme jour, -
Ainsi de la douleur au coeur de notre Amour!
Que serais-je sans Toi sur terre devenu, -
Dans l'effrayant désert de mon silence nu?...
Tu viens...
Tu viens détruire en moi l'essence de mes jours,
Ciel où l'éternité se mêle à mes Amours!
HOMME :DÉSERT ! IMMENSITÉ !
Homme : Désert ! Immensité !
Fleuve de sable où surabonde
Et jusqu'en l'âme vagabonde
En sa diversité féconde
Cette extrême fragilité
Qui la rend folle comme l'onde ! -
"Je suis ton Maître, dit le Vent ! -
D'un seul souffle que nul ne sonde
Et qui ne cesse une seconde
De mouvoir ineffablement
En un flot de lumière blonde
Le cours des astres à la ronde ;
Sans comprendre sur quoi se fonde
Ton suprême balancement ;
Que ton âme s'apaise ou gronde,
Par l'espace ou dans l'eau profonde,
Je te promène par le monde , -
Comme un Abîme en mouvement !"
(Vignes, le 4-04-2002)
Je bois le vent qui vient boire mon âme vive,
Comme la berge boit l'eau vive sur sa rive,
Et comme vient le souffle fou des vains espoirs
Boire l'âme du vent dans l'or des reposoirs !
(1ère version de SOLEIL DE MA MEMOIRE) Dans un autre recueil)
Je fermerai mes bras sur ton seul silence,
Au-delà des plus calmes nuits et des jours,
Au-delà de la transparente apparence
De ton corps paré de si mortels atours ;
Et je t'enserrerai d'âme la plus vive
Au-delà des mouvements nus de la chair,
Où plus rien n'existe en l'être qui le prive
De vivre les plus purs songes de l'éther, -
Comme d'un vaisseau d'Amour à la dérive
L'or même plonge et soudainement se perd
Au centre ultime de ton plus clair désert,
Et qu'enserrent les bras tendres de la mer ...
Je ressemble à ce vent qui frôle mon visage
Comme un souffle de main qu'on n'ose déranger
Et qui nous ferait croire, à l'ombre du rivage,
Que pour vivre à l'abri du monde et de l'orage
Il n'y a plus soudain sur terre de danger !
A
Celui
qui nous sauva de ces murs
Dévore , son Coeur, tout ce qui s'écoule
D'humaine tendresse et d'âme en son bord.
Elle avalerait même de la mort,
Pourvu qu'en son sang les soleils qui roulent
Transforment alors la mort même en or !
J'attends de mourir pour ne plus surprendre,
Tout au fond de moi, ce désert de feu
De murs si profondément de couleur de cendre
Qu'ils m'empêcheraient même de voir Dieu !
L'aveugle muraille où les jours s'en vont
Finir de mourir avec le soleil,
Te frappe le coeur avec l'âme au front
D'un silence même à la mort pareil !
Le ciel est mangé par cette muraille
Qui dresse sa forme âpre devant moi :
Mon esprit se trouble et mon coeur défaille
Que le ciel n'y puisse être plus le roi !
Je m'enfonce en l'ombre où l'ombre n'existe
Que pour mieux sonder l'âme en sa douleur ;
Et l'âme de l'âme en moi qui persiste
N'est que la présence en moi du malheur.
Ah! que me délivre, à l'heure certaine
Où je m'enfuirai de ces lieux cernés
De plus qu'il ne faut d'ombre souterraine,
Cette immensité de chaleur humaine
Des jours qui jadis m'y furent donnés !
Mais rien ne me reste, au fond de moi-même,
Que le souvenir de ces jours passés;
Les jours sont trop courts ici quand on aime
Et qu'à tous les vents les désirs qu'on sème
Sont par ces vents même un jour effacés.
Destin qui s'achève alors que l'espace
Surgit à jamais nu devant mes yeux;
Saurai-je jamais retrouver la trace
Au-delà des jours où le jour trépasse
Des jours abolis de tous mes aïeux ?
Le temps se resserre autour de ma gorge,
Et je n'entends plus battre, au fond de moi,
Que les longs coups sourds, comme d'une forge,
D'un mal qui me glace l'âme d'effroi !
("Cahiers Bleus")
Sang de la vigne et de la vierge:
Automne folle qui s'éprend
De vierge pâle comme cierge,
De vigne rouge comme sang!
Qui sait ce que je sais, devrait relire Dante:
Il n'est pas d'autre Enfer ici qui ne me hante!
Il est un mot qu'on ne prononce, tant il rime
Avec ce qu'il y a de pire dans l'abîme!
Si vous mêlez le sang des morts à votre esprit,
De ceux-là que jadis un sombre éclair surprit,
Leur silence emplira vos tombes comme un cri!
Si vous mêlez le sang des morts à votre esprit,
De ceux-là que pour l'âme un sombre éclair surprit,
Leur silence emplira vos tombes comme un cir!
Eurydice! Eurydice! au fond du labyrinthe,
Entends monter vers toi mon indicible plainte! -
Par le feu qui dévore au sein des univers
Et la mort du soleil et l'âme dans les airs!
Nuages emportés par ce grand souffle noir
Surgit soudainement du fond de l'Atlantique , -
Vous embrumez le jour de tout ce faux miroir
Epris du sombre éclat du songe pathétique
D'un soleil qui se meurt dans l'oeil qui le vient voir!
Vous avez traversé la vérité profonde
De ce temps par le flot des songes déserté,
Pour en faire sugir, comme la source l'onde,
A travers la détresse immense de ce monde
Quelque chose d'un rêve encore de Beauté!
Regarde l'ombre; et vois quel est au ciel ton signe; -
Et la place de l'âme en ton regard insigne!
Ma pauvre Enfant perdue en la tempête affreuse
Qui te brise l'esprit par cette mer houleuse, -
Mon cri transperce l'ombre où le regard vient choir
Dans le gouffre qui s'ouvre en l'âme avec le soir!
- Vos cris, en la lumière ardente de l'Automne,
En mon âme infinie infiniement résonnent
Et me disent qu'il n'est rien d'autre si profond
Qu le bruit que vos cris dans l'air vivace font!
Dévaste-moi du fond vivant de ta blessure,
Toi qui traverses l'ombre et l'âme comme un cri !-
Rends-moi le goût, dis-moi, de cette Source pure
Dont le rêve d'y boire en songe me surprit!
Ah! quand donc finiront tous ces "Travaux d'Hercule"
Qui te brisent le coeur et te cassent les dents ; -
De tout ce pauvre corps toujours qui gesticule,
- Avec la mort dedans !
La morsure du vent dans la ténèbre claire
A fait jaillir enfin les sources de la terre
Et pénétrer de gloire au sein des astres fous , -
Ce Mal qui s'en venait mordre le ciel en nous!
- Le soleil qui s'éprend des sources de la mer,
Songe-t-il à celui qui meurt dans le désert ,-
D'une semblable soif à celle de la chair ?...
(De la terrible soif en l'âme de la chair?...)
Le meuglement des bêtes folles de douleur,
Quand le soir, d'un parfum de mort, les environne,
Il m'étonne qu'en toi ce meuglement t'étonne; -
Car l'angoisse t'enserre et le tonnerre tonne
Jusqu'au fond d'une chair où le désir résonne
D'un tourment qui pénètre en toi comme en personne;-
Et ne meugles-tu pas en l'ombre aussi, mon Coeur?...
Et je suis cet infirme entre les bras du temps, -
Qui marche et ne sait pas vers quelle ultime cible,
Avec des soubresauts d'éternité terrible,
Et qu'emporte, au-delà de toute soif visible,
La furieuse fougue, en l'âme, des autans!
La mer n'est plus la mer!... La mer au rythme sombre!
La mer toujours semblable, avec son flot amer!
La mer toujours amère, en mon silence, sombre
Au-delà de l'esprit lui-même et de la chair!
La mer s'en va rejoindre, et son désir sans nombre,
En l'ombre sans retour, de l'Innocence, l'Ombre! -
La mer s'en va de moi!... La mer n'est plus la mer!...
Le vent frais qui se lève au fond de ma mémoire
Me délivre des feux torrides de l'été; -
Que dirai-je de moi, si l'on ne peut y croire,
Toi qui connais si bien le fond de mon histoire:
De l'avoir, quelque jour, à tous les vents jeté!
Belle, dans le vent,
Brusquement s'allume
Et te jette, écume,
Dans la folle brume
D'une mer qui fume
Au Soleil levant!
Si le grand vent du large environne mes tempes,
L'air me cherche à travers le rêve des jours vains:
Le jour qui fuit se mêle à ceux des lendemains;
Du feuillage tremblant vois l'ombre sur mes mains;
L'astre dans mon regard met des millions de lampes; -
Mais que de clairs soleils en moi se sont éteints!
O NUAGES PROFONDS...
- O nuages profonds qui balayez la nue,
Comme si vous n'étiez que seuls à concevoir
Ce qui dérive en nous d'éternité perdue
Dans l'immense lointain des jours que l'on peut voir,
Et, traversant les feux brûlants de l'étendue,
Quelle force vous fait vous perdre en l'âme nue,
Quand la mer plonge en nous les feux de son miroir!
INEXTINGUIBLE
Le malheur est entré dans l'âme par la mort
De ce qui reste en nous de force inextinguible; -
Lequel sera des deux, dans l'âme le plus fort:
De l'éternité vierge ou du temps pris pour cible?...
NOCTURNE
La nuit s'enfonce en moi comme un poignard de mort
Que le vent du désert rend plus terrible encor;
Tellement le visage unique de la nuit
Fait trembler mon visage au fond du temps qui fuit!
AU SEIN DES UNIVERS!...
Le criminel à petit feu dans l'ombre sourde
Fait trembler de malheur son âme triste et lourde
Et renaître le Mal où le plus calme coeur
Ne cherchait que la fuite ouverte du Malheur
Et ne rêvait jamais que de survivre enfin
A ce Mal qui l'étreint d'une si folle faim
Que l'or du clair soleil des jours se dissimule
En cette vérité vivante qui recule
Jusqu'au ciel préféré que les plus sombres chairs
Font mourir dans les airs au seins des univers!
DÉSERT ! IMMENSITÉ !
Homme : Désert ! Immensité !
Fleuve de sable où surabonde
Et jusqu'en l'âme vagabonde
En sa diversité féconde
Cette extrême fragilité
Qui la rend folle comme l'onde ! -
"Je suis ton Maître, dit le Vent ! -
D'un seul souffle que nul ne sonde
Et qui ne cesse une seconde
De mouvoir ineffablement
En un flot de lumière blonde
Le cours des astres à la ronde ;
Sans comprendre sur quoi se fonde
Ton suprême balancement ;
Que ton âme s'apaise ou gronde,
Par l'espace ou dans l'eau profonde,
Je te promène par le monde , -
Comme un Abîme en mouvement !"
(Vignes, le 4-04-2002)
Je bois le vent qui vient boire mon âme vive,
Comme la berge boit l'eau vive sur sa rive,
Et comme vient le souffle fou des vains espoirs
Boire l'âme du vent dans l'or des reposoirs !
Emmaüs
Visage pénétré de haute Solitude
Et de Réalité plus brûlante que toi,
Ne crains-tu rien de ce grand gel intérieur
Qui nous prend l'âme aux rêts des drames de la peur,
Vivante et pourtant morte, quand s'élude
La connaissance même, et toute certitude,
Au fond d'un grand paysage de neige, - froid!
Je suis le joli flamant rose:
Sur mes larges pattes palmées,
Je vais, je viens, je me repose ;
Et suis le roi de toute chose,
Quand le soleil met une rose
Dans le miroir des eaux calmées.
Chapeau de paille et coeur joli,
S'en vont tous deux par la campagne
Courir les fleurs de la montagne,
Et mon regard les accompagne
A travers le grand bois fleuri :
Chapeau de paille et coeur joli.
Dans la pâleur d'un soir qui donne le vertige,
A faire perdre au coeur la force et la raison,
Tu surgis solitaire et ton ardente tige
Tourne vers le soleil qui peuple l'horizon
Le seul feu par lequel le triste hiver se fige !
MIROIR DE L'ÂME
Triste - ah ! - de ne se pas savoir
Fait seulement pour si légères
Et fines larmes recevoir
Que nul regard comme étrangères
Les puisse même concevoir,
Toutes joyeuses de s'ébattre
A l'extrême pointe des cils
Clairs encor de leur eau bleuâtre
Qui va tomber au fond des fils,
Mais de ces sources singulières
- Comme de l'être le plus pur ! -
Qui font jaillir sous les paupières
Un incroyable deuil d'azur,
O réceptacle salutaire
Et digne enfin du souvenir
De l'oeil qu'une douleur altère
Au point de ne pouvoir sur terre
Le sel des larmes contenir,
Ouvre-moi ton sein qui me hante
De la blancheur d'un tel miroir
Qu'il n'est âme qui se lamente
Ou de quelque bonheur s'enchante
Qui ne s'y penche sans s'y voir,
Afin que, pâle dans le soir,
Se précipite pour y choir
L'ultime larme qui délivre
De tous les feux du désespoir
Et - fol moi-même d'y vouloir,
Au-delà de mes pleurs, survivre
Au charme à la fois tendre et noir
D'un songe encore qui m'enivre -
Que j'y plonge mon coeur, Mouchoir !
Quel songe nous entraîne, en ce désert de l'homme
Où tu marches sans craindre rien de l'Ennemi,
Promenant ton regard de peintre où Dieu gémit,
Et ce Verbe qui parle humainement en somme
Un langage dont l'âme infiniment frémit ; -
Tandis que je m'en vais, avec mon pauvre somme,
A peine encor vivant, presque mort à demi,
Comme si déjà plus Rome n'était dans Rome,
La plus belle pourtant des Villes que l'on nomme,
Me perdre en le Pays profond de l'Endormi ?
A l'éminent et très cher Ermite que je sais
O toi, qu'un vent profond de solitude avive,
Laisse tout ce qui meurt mourir à tes pieds nus ;
On ne change pas l'âme en la changeant de rive ;
L'esprit s'accroît des feux dont le désert le prive,
Pour un rayonnement qui ne s'éteindra plus ; -
Car, si loin que le coeur en l'univers s'active
A susciter l'éclat d'un songe qui le suive,
Lorsque l'âme n'est plus que de Dieu seul captive,
Le regard s'agrandit des cieux qu'il a perdus !
Me transperce comme une lance,
Jusqu'à la cime de l'esprit,
En mon désert la survivance
De la secrète fulgurance
Du pur silence de ton cri.
(4 novembre 2002, 14h30)
A mon ami, le Poète Roger-Jean Charpentier
Je n'ai pas soulevé la pierre où tu dormais,
Bel Ange, sans surprendre une autre solitude
Ni de mes doigts pliés aux longues habitudes
Sans susciter le rêve aux rives que j'aimais...
Quel songe, au plus secret de ton âme égarée
Par la sérénité trompeuse de son or,
Te retient de survivre en la chaleur dorée
D'un jour qui t'illumine à travers l'ombre encor?
Incroyable dormeur où règnent des merveilles!...
Ah! saurai-je éveiller, dans son antre sacré,
La déesse, ma soeur la Muse, quand j'irai
D'une insolente main lui tirer les oreilles
Pour lui dire qu'elle bourdonne en plein été
Dans ta cervelle ainsi qu'une abeille en délire
Et t'apporte - au milieu de ton calme enchanté
Sur ta pierre de proue en l'eau de mer - la lyre,
Les arbres, les fruits mûrs, les parfums, le ciel doux,
Le miel et la colombe et la grappe vermeille,
Et plus près de ton coeur, - adorable à genoux! -
Une larme d'azur ivre parmi les treilles!
(Juin 1950)
Souffle sur toi la mort vivante,
Insecte vert parmi les prés ;
La mort vivante, ton Amante,
Avec tes ailerons dorés ; -
Insecte vert parmi la menthe,
Où les feuillages mordorés
Font pleuvoir cette mort savante
En laquelle, de flamme ardente
Et pour tout l'avenir, s'invente,
A mesure que le ciel chante,
Ton rêve d'or, parmi les prés !
Poèmes publiés dans le bulletin de l'"Union de Prière"
Ah! dites moi, très cher Louis,
De votre coeur quel est le songe
Par-delà tous les aujourd'huis
Et quel miracle en vous prolonge
Ce Jour plus calme que vos nuits, -
Tandis que mon silence plonge,
En cet espace aux mornes fruits,
D'une tristesse qui me ronge,
Au pur secret des jours détruits?
(6 juillet 1975)
La grande paix profonde, en l'âme, de l'absence;
Quand le songe n'est plus que morsure du feu; -
L'orage en toi, vivant, de toute la présence
De l'immobile Nuit solitaire de Dieu!
(Noël 1983)
A Monsieur l'Abbé Félix Peccard
De la vague mortelle à l'éternelle errance
En nous de l'Océan qui n'a ni bords ni fin,
Qui jamais ne s'achève et toujours recommence
En notre âme à creuser l'inaltérable faim,
Votre lèvre tremblante encore et la plus pure
N'a cessé de redire, en la ténèbre dure
De ce mal en plein coeur soudain qui vous perdit
Et comme elle l'avait déjà souvent redit
A l'autel vénéré de l'Etre sans souillure,
Mais dans un souffle alors étreint par la blessure,
D'Amour: "Introïbo ad altare Dei!..."
Très cher Henri
(Le grand Qheff')
In memoriam
Le grand Queff' est parti pour sa dernière errance,
Sur cette mer sans bord d'où l'on ne revient pas;
Et comme s'il savait vers quelle Survivance
Et quel ultime Port voguait son Espérance, -
Quand la Mer le tenait sur terre entre ses bras!...
"Ton regard éperdu, sur la Mer sans rivage,
Comme je t'écrivais, ce matin s'est posé; -
Quel songe poursuivait ton âme en grand voyage,
Quand l'aile de l'Archange, au centre de ton âge,
Et sans que rien ne puisse en détourner l'ombrage,
Sur ton coeur brusquement s'en vint se reposer?..."
(20-1-92)
Etre sans Nom! Visage inexprimable!
Gouffre d'Amour en l'Océan des Nuits!
Forme sans Forme! O Songe délectable!
O Profondeur immense de ce Puits
Où vient surgir la Source inépuisable!
Splendeur sans fin qui dans l'abîme luit!
De toutes les soifs humaines, l'Habitacle!
Et de nos pauvres larmes, Réceptacle!
O, pour mon âme insatiable, Fruit!
O sable déserté par ce qui le dévore!...
Le filet recule au fond de l'infini perdu!
Qu'est-ce de toi, pauvre âme, et qu'est-ce qui t'implore? -
De fond de l'horizon, quelle Tendresse encore
D'un Dieu peut-être en toi, dans l'ombre, reconnu?...